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Quotidiens ivoiriens: chute du chiffre d’affaire de 6 à moins de 2 milliards Fcfa

Le chiffre d'affaires cumulé de la presse quotidienne, en Côte d'Ivoire, est passé de 2011 à 2021, en dix ans,…

Le chiffre d’affaires cumulé de la presse quotidienne, en Côte d’Ivoire, est passé de 2011 à 2021, en dix ans, de 6 milliards Fcfa à moins de 2 milliards de Fcfa, soit une chute de 70%.

Ces données ont été indiquées, vendredi, par M. Samba Koné, le président de l’Autorité nationale de la presse (ANP), l’organe de régulation de la presse écrite et numérique ivoirienne, lors de la 4e session de « ANP Academy ».

« Le chiffre d’affaires de la presse quotidienne est passé en une dizaine d’années de 6 milliards Fcfa à moins de 2 milliards Fcfa, (ainsi) de 2011 à 2021, la chute enregistrée est de 70% », a précisé M. Samba Koné à l’ouverture de cette session, qui est la première de l’année 2022.  

Pour preuve, fera-t-il observer que, les 20 quotidiens présents dans les kiosques sur le marché en Côte d’Ivoire font une « vente cumulée quotidienne d’à peine 15.000 exemplaires face à de maigres ressources ».  

Selon M. Samba Koné, « il convient de noter que la mise sur le marché d’un journal quotidien nécessite une charge mensuelle de l’ordre de 15 millions de Fcfa soit environ un investissement de 200 millions de Fcfa par an ». Par conséquent, il faut être professionnel sur toute la ligne. 

A l’évidence, les causes de la crise que traverse la presse ivoirienne sont multifactorielles, a relevé M. Samba Koné pour qui « chaque facteur mérite une attention toute particulière en vue de trouver des solutions pérennes ».     

L’ANP, dira-t-il, pense qu' »il est impératif de rechercher une partie des causes dans la qualité de certains contenus mis à la disposition du public », tout en dénonçant ces contenus qui dans bien de cas relèvent davantage de la communication politique, plus que du journalisme. 

Pour cette première session de ANP Academy 2022, le régulateur entend s’intéresser aux contenus des journaux. Selon M. Samba Koné, « c’est la qualité du produit, en l’occurrence le contenu, qui peut susciter l’achat d’un journal et la fidélisation d’un lecteur ».    

Au cours d’un panel autour du thème « Journalisme: entre militantisme et professionnalisme », il a été soulevé la question de savoir si un journaliste militant peut revendiquer être un journaliste professionnel attesté par la pratique quotidienne.

Trois personnalités ont animé ce panel. Dr Sidiki Bamba, enseignant-chercheur, et deux journalistes séniors, Charles Sanga d’un journal pro-Rhdp Le Patriote et César Etou, un militant de l’opposition dont le quotidien La Voix Originale est proche du parti de Laurent Gbagbo. 

Militant du Rhdp, le directeur de publication de Le Patriote, Charles Sanga, dit militer pour une cause idéologique, mais n’a « aucun lien administratif et juridique » avec le parti au pouvoir. En outre, le fondateur de Le Patriote n’a jamais donné d’orientation sur la Une ou un papier.

« Le problème à mon avis se pose au niveau du respect du Code de déontologie », a-t-il estimé, indexant l’équilibre de l’information qui est pour la plupart du temps « reproché le plus » au quotidien Le Patriote, selon les statistiques. 

M. Charles Sanga a ensuite soutenu qu' »on peut être un militant et pratiquer de manière professionnelle le journalisme », tout en évoquant « la responsabilité » du journaliste dans le traitement de l’information. 

Également militant, César Etou, qui dirige le journal La voie originale, a cité des journalistes militants, émérites, tels que Laurent Dona Fologo ou Jean-Pierre Ayé, qui en dépit de leur attachement à des formations politiques ont fait montre de professionnalisme. 

Il a d’ailleurs fait observer que « l’indépendance est enfermée dans la ligne éditoriale, mais il faut rester professionnel ». M. Etou, prix Ebony du meilleur journaliste ivoirien en 1996, soutient qu' »un militant politique peut être un bon journaliste s’il respecte les règles de déontologie ».

Dr Sidiki Bamba a fustigé le fait que les journalistes militants « se laissent dicter des papiers ». De ce fait, les quotidiens qui font la propagande des partis devraient être appelés des « journaux de partis », car le principe qui gouverne tout métier est le respect de la déontologie.     

« Il est difficile d’être journaliste militant et être professionnel », a-t-il dit, ajoutant que le journaliste militant tiendra le parti quoi qu’il fasse et va dans le sens en faveur du parti, et le journaliste ne peut faire autrement. 

« Nullement, si on prend toutes les éditions de La voie originale, du Patriote, on ne trouvera un article de part et d’autre, dans La Voie originale encensant M. Ouattara ou dans Le Patriote, encensant M. Gbagbo (…). Il faut dire que vous êtes des journaux de parti », a-t-il relevé.

Le président de l’Observatoire de la liberté de la presse, de l’éthique et de la déontologie (OLPED), Zio Moussa, a pour sa part souligné les titres de gloire, attirant l’attention des médias afin de ne pas servir d’instruments pour des conflits.

M. Denis Kah Zion, maire de Toulepleu et patron de Le Nouveau Réveil, journal proche du Pdci (opposition), a porté les regards sur les enjeux économiques, invitant l’Etat à soutenir le secteur pour une presse viable.      

Aujourd’hui, la presse connaît une crise sans précédent. Les éditeurs et les distributeurs se rejettent la responsabilité de la mévente des journaux. Mais, le constat est que beaucoup de lecteurs ont tourné le dos au journal imprimé, d’où l’impératif pour le secteur de se réinventer.